À mesure que la pandémie de COVID-19 se propage, nous comprenons mieux qui sont les personnes les plus à risque

20 mai 2020

Le premier contact de Direct Relief avec la pandémie de COVID-19 a eu lieu à la mi-janvier, quelques jours avant que le gouvernement chinois ne ferme l’accès à Wuhan. Selon les premiers rapports, les personnels de santé du Union Hospital de Wuhan traitaient tellement de patients qui présentaient des complications graves du nouveau coronavirus qu’ils risquaient d’épuiser leurs stocks d’équipements de protection individuelle (EPI). Le réapprovisionnement par les circuits commerciaux en Chine se révélait difficile, ce qui avait déclenché la demande d’aide humanitaire. La situation était étonnante, et pas seulement en raison de l’ampleur de ce nouveau virus et de la rapidité avec laquelle il se propageait, mais également parce qu’on signalait des pénuries d’équipement de base, tels que des masques N95, au cœur du géant de l’industrie manufacturière qu’est la Chine. 

Les personnels sanitaires faisaient partie des personnes les plus à risque. Des milliers d’agents de santé ont fini par être infectés, des centaines ont dû être hospitalisés et des dizaines sont décédés. C’est le modèle habituel, rencontré précédemment dans de nombreuses épidémies telles qu’Ébola en Afrique de l’Ouest, les personnes en première ligne étant celles qui payent le plus lourd tribut à la crise. 

Direct Relief a pu envoyer immédiatement des centaines de milliers d’EPI à 50 structures sanitaires différentes, afin de protéger les agents de santé de première ligne. À l’époque, cela semblait une riposte colossale dans un pays qui n’autorise que rarement l’aide humanitaire externe. Mais ce n’était que le début. 

L’âge, les comorbidités et les liens entre les charges de COVID-19 et MNT

Au cours de la riposte en Chine, le profil de risque initial de la COVID-19 est clairement apparu : les personnes de 65 ans et plus, présentant souvent des comorbidités, avaient généralement besoin d’être hospitalisées et nécessitaient des soins intensifs, respiration artificielle par exemple, à une fréquence bien plus élevée que le reste de la population.  

Les données provenant de Chine sont allées directement alimenter la riposte de Direct Relief aux États-Unis. Outre un système de santé particulièrement fragile pour les personnes ayant des revenus modestes, les États-Unis ont aussi une importante population vieillissante qui doit gérer une ou plusieurs maladies chroniques. Dès la mi-février, il était clair que si la COVID-19 atteignait le pays, les conséquences pourraient être graves. 

Les données issues du Center for Disease Control (Centre de contrôle des maladies) font apparaître le lien étroit entre coronavirus, âge et comorbidités. Ainsi, les taux d’hospitalisation augmentent régulièrement pour chaque tranche d’âge de 10 ans au-dessus de 65 ans : 12,2% des cas de COVID-19 font l’objet d’une hospitalisation entre 65 et 74 ans, cette proportion atteignant 17,2% pour les personnes de plus de 85 ans. 89% de tous les patients hospitalisés pour COVID-19 avaient au moins une maladie sous-jacente, ce taux étant de 94,4% pour les patients âgés de plus de 65 ans. Comme en Chine, les affections signalées le plus souvent étaient l’hypertension, l’obésité, le diabète et l’asthme.  

Vulnérabilités médicales et vulnérabilités sociales 

Le risque de transmission de la COVID-19 est, de toute évidence, lié aux maladies chroniques, à la démographie et à l’économie et dessine ainsi des paysages bien définis de vulnérabilité sociale face à la pandémie. Les estimations actuelles montrent par exemple que le taux de diabète chez les Afro-Américains et les Latino-Américains atteint en moyenne 17-18%, soit plus du double du taux de la population blanche non-hispanique. Ces mêmes groupes sont également plus susceptibles d’occuper des emplois jugés « essentiels » pendant la pandémie, tels que les échelons intermédiaires et inférieurs des soins de santé ou les services et la logistique, ce qui signifie qu’ils sont moins à même d’appliquer la distanciation sociale. Ces facteurs entraînent un risque accru d’hospitalisation et de complications graves de la COVID-19.  

Direct Relief soutient habituellement des structures sanitaires servant de « filet de sécurité » et que la Loi impose dans les « déserts médicaux », et ces structures suivent les lignes plus globales de vulnérabilité médicale et sociale à travers le pays. La plupart du temps, la composition du personnel sanitaire reflète la composition de la communauté environnante. Ceci signifie que les agents de santé en général sont plus susceptibles d’être exposés au virus, et que les travailleurs sanitaires des communautés Afro-Américaines et Latino-Américaines ont plus de probabilités de développer des complications graves.  

Pauvreté, sécurité alimentaire et patients immunodéprimés dans les pays du Sud

À mesure que la géographie du virus évolue vers les zones les plus pauvres des pays du Sud, notre compréhension des risques et des vulnérabilités doit, elle aussi, évoluer. Si les risques associés à l’âge et à la charge de maladies chroniques ne changeront probablement pas significativement, ce qui évolue ce sont les effets secondaires liés au contrôle des déplacements et aux pénuries de médicaments dans les pays les plus pauvres, ainsi que les nombreux risques associés au nombre élevé de personnes immunodéprimées dans les pays du Sud, en raison notamment du VIH/SIDA.  

Selon le Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU, pas moins de 265 millions de personnes seraient menacées de famine, car l’interdiction des déplacements perturbe l’accès aux calories et aliments de base et l’insécurité alimentaire grandissante affecte les systèmes immunitaires des personnes de tous âges. Si les pays du Sud ont des populations en moyenne beaucoup plus jeunes qu’en Europe, en Chine et aux États-Unis, ils doivent également faire face aux charges de VIH chronique et de tuberculose et paludisme endémiques. En Afrique subsaharienne on estime actuellement à 24 millions le nombre de personnes vivant avec le VIH. Chacune d’entre elles, quel que soit son âge, fait partie du groupe à plus haut risque de complications graves de la COVID-19.  

Parallèlement, des dizaines de pays ont pris des mesures de contrôle des exportations d’EPI indispensables, ce qui a provoqué une hausse des prix mondiale. Les gouvernements se trouvent à présent en difficulté pour affecter les budgets de la santé déjà maigres à la couverture des coûts, en augmentation. 

Si nous voulons relever les défis posés par la pandémie, il nous faut continuer à perfectionner nos connaissances et savoir quelles sont les populations les plus à risque, en nous fondant non seulement sur les caractéristiques du virus mais également sur celles de nos sociétés.

 

About the author

Dr. Andrew Schroeder (@DirectRelief) has developed and implemented a number of projects at Direct Relief to demonstrate programmatic impact, including Mapping Global Prevention of Mother-to-Child Transmission (PMTCT) of HIV/AIDS; Spacial Analysis of the Global Diflucan Distribution Programme; development of GIS-based laboratory monitoring in Ethiopia; and USA Safety Net Mapping, with was cited in the New England Journal of Medicine. Schroeder has also presented findings from his research ar Direct Relief at prominent conferences, including the Global Health Council and the InterAction Forum.