À savoir
- La couverture sanitaire universelle (CSU) est un système qui permet à chaque personne d’avoir accès aux services de santé de qualité dont elle a besoin, sans subir de difficultés financières
- La CSU a le potentiel d’améliorer considérablement la santé mondiale et de réduire la pauvreté, mais elle ne peut être réalisée que si les maladies non transmissibles (MNT) sont incluses dans les régimes nationaux de prestations de santé de la CSU.
- La moitié de la population mondiale, au moins, ne bénéficie pas actuellement d’une couverture complète des services de santé essentiels, et des millions de personnes sont acculées à l’extrême pauvreté chaque année en raison des paiements directs des soins de santé.[1]
- Prévue en septembre 2023, la Réunion de haut niveau sur la CSU constitue un moment clé pour faire progresser la prévention et la lutte contre les MNT ainsi que d’autres priorités de santé. Un dossier de plaidoyer présente les principales demandes de plaidoyer.
Qu’est-ce que la couverture sanitaire universelle ?
La couverture sanitaire universelle (CSU) est un engagement politique ancré dans la conviction que le meilleur état de santé physique et mentale possible est un droit humain fondamental et que chacun doit avoir accès à des services de santé essentiels de qualité sans subir de difficultés financières.
La CSU s’appuie sur les régimes de soins de santé primaires des pays et entend fournir à toute la population des services de santé complets et de haute qualité tout au long de la vie et dans tout le continuum de soins, y compris la promotion de la santé, la prévention, le dépistage, la gestion, la réadaptation et les services de soins palliatifs.
Elle veille également à protéger les individus contre les dépenses élevées et accorde la priorité aux communautés défavorisées. Les soins de santé primaires (SSP) sont considérés comme le moteur de la CSU, car ils émancipent les communautés, encouragent la responsabilité sociale et l’action multisectorielle, et permettent l’intégration des services de santé et de solutions numériques innovantes.
Engagements politiques en faveur de la santé pour tous
En septembre 2023 se tiendra la deuxième Réunion de haut niveau (RHN) des Nations Unies sur la couverture sanitaire universelle (CSU), une opportunité majeure pour faire progresser la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles (MNT), ainsi que d’autres priorités de santé.
Ce sera également l’occasion de faire le point sur les progrès accomplis depuis la première RHN sur la CSU en 2019 et d’identifier les domaines pour faire progresser la politique de CSU en vue d’atteindre les objectifs de santé. Il s’agit tout particulièrement de l’Objectif de développement durable (ODD) 3.8 qui vise à « faire en sorte que chacun bénéficie d’une couverture santé universelle, comprenant une protection contre les risques financiers et donnant accès à des services de santé essentiels de qualité et à des médicaments et vaccins essentiels sûrs, efficaces, de qualité et d’un coût abordable. »
En 2019, les dirigeants mondiaux ont signé la première Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle, dans laquelle ils se sont engagés à fournir progressivement à un milliard de personnes supplémentaires d’ici 2023 des services de santé essentiels de qualité et des médicaments essentiels à un prix abordable. Ils se sont également engagés à stopper et inverser la tendance à la hausse des dépenses de santé à la charge des patients, qui constitue une situation catastrophique, et à éliminer la paupérisation due à ces dernières d’ici 2030.
Malgré ces engagements politiques, la CSU n’a pas encore été pleinement réalisée. Environ la moitié de la population mondiale n’a pas accès aux services de santé essentiels et 100 millions de personnes tombent chaque année dans l’extrême pauvreté en raison des dépenses de santé à leur charge.[2] Et, selon les objectifs fixés en 2019, 710 millions de personnes restent encore à atteindre d’ici 2030.[3]
Mise en œuvre de la couverture sanitaire universelle – où en sommes-nous aujourd’hui ?
Les maladies non transmissibles, telles que le diabète, les maladies cardiovasculaires, le cancer et les maladies respiratoires chroniques, constituent les principales causes de mortalité et d’incapacité dans le monde et sont responsables de 71 % des décès à l’échelle planétaire. 85 % des décès prématurés dus aux MNT se produisent dans les pays à revenu faible et intermédiaire, un chiffre vertigineux.
De nombreux pays peinent à intégrer les MNT dans leurs régimes de prestations de couverture sanitaire universelle (CSU) et sont en retard sur l’ODD 3.4, qui appelle à réduire d’un tiers les décès dus aux MNT par la prévention et le traitement, et à promouvoir la santé mentale et du bien-être.[4]
Bien que les données sur l’inclusion de la prévention et de la prise en charge des MNT dans les régimes de CSU soient limitées, elles révèlent d’importants écarts dans la couverture au sein des pays et entre eux.
Couverture des services
Accès à des services essentiels de qualité tout au long du continuum de soins, sans laisser personne de côté
De nombreux pays ont du mal à assurer une couverture et un accès adéquats aux services liés aux MNT dans tout le continuum de soins (dépistage, diagnostic, traitement, réadaptation et soins palliatifs). Ainsi, la moitié des adultes atteints de diabète ne sont pas diagnostiqués et n’ont pas accès à l’insuline[5] ; seule 1 personne hypertendue sur 5 est sous contrôle médical[6] ; l’insuffisance rénale chronique n’est souvent pas traitée[7] ; et plus de 90 % des patients atteints de cancer dans les pays à faible revenu n’ont pas accès à la radiothérapie[8].
Les systèmes de santé sont trop souvent fragmentés et axés sur la prise en charge d’une seule maladie au lieu de suivre une approche intégrée portant sur toute la durée de la vie.
Selon le rapport 2023 sur l’état de l’engagement en faveur de la CSU, si de nombreux pays ont fait de la CSU un objectif de leurs politiques et plans nationaux, seuls quelques-uns ont élaboré un plan d’action clair pour y parvenir, et les efforts se sont souvent concentrés sur des programmes de santé verticaux plutôt que sur une prise en charge globale de la population.[9]
Couverture de la population
Un accès équitable aux services de santé pour toutes les populations, qui ne laisse personne de côté
Malgré les efforts déployés pour améliorer l’accès aux services de santé pour toutes les populations, les inégalités sanitaires persistent, en particulier pour les groupes marginalisés et les personnes à faible statut socio-économique. Ces personnes courent un risque plus élevé de mourir d’une MNT en raison du manque d’accès aux services de santé et de leur exposition à des facteurs de risque. Les paiements directs de santé plongent également ces groupes dans la pauvreté.
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Le rapport 2023 sur l’état de l’engagement en faveur de la CSU indique que bon nombre des efforts de mise en œuvre ne se sont souvent concentrés que sur quelques groupes de population et que des pratiques discriminatoires ont été signalées. La pandémie a probablement creusé ces inégalités et la participation des acteurs non étatiques aux efforts visant à améliorer le suivi, l’évaluation et la responsabilisation de la CSU est limitée. Qui plus est, seuls quelques pays ont mis en œuvre des mécanismes formels de responsabilisation pour la CSU.
Protection financière
Lorsque des mécanismes de protection contre les risques financiers sont en place pour s’assurer que le coût du recours à la prise en charge ne fait pas courir aux individus des risques de difficultés financières.
Le rapport 2023 sur l’état de l’engagement en faveur de la CSU montre que les pays se concentrent principalement sur la couverture des services et de la population pour la CSU, mais que l’accent n’est pas suffisamment mis sur la protection financière.
Seuls 45 % des pays ont fixé des objectifs de dépenses nationales spécifiques à la santé dans leurs plans et politiques, et les dépenses en soins de santé primaires n’ont pas augmenté ces dernières années. Ce manque d’investissement, qui s’ajoute aux obstacles financiers persistants aux soins de santé, continue d’alourdir la charge des MNT dans le monde, malgré les objectifs et cibles politiques internationaux fixés en matière de MNT et de CSU.
Comment faire de la couverture sanitaire universelle une réalité ?
La réalisation de la couverture sanitaire universelle (CSU) et de l’ODD 3.8 ne sera possible que si les MNT sont incluses dans les politiques nationales de CSU et dans le cadre des efforts visant à atteindre également les objectifs en matière de MNT de l’ODD 3.4.
L’agenda actuel des MNT est axé sur cinq grandes maladies (maladies cardiovasculaires, cancer, diabète, maladies respiratoires chroniques et troubles mentaux et neurologiques) et cinq facteurs de risque modifiables (tabagisme, sédentarité, consommation d’alcool, mauvaise alimentation et pollution de l’air). Ces maladies étant chroniques et se développant lentement, elles nécessitent une approche tout au long de la vie, ce qui rend cruciale l'intégration de la prévention et de la prise en charge des MNT dans la CSU.
Il est donc important que les services de prévention et de prise en charge des MNT soient financés et inclus dans le continuum des soins des régimes nationaux de CSU. Cela inclut la liste des interventions rentables connues sous le nom de Meilleurs choix, mais des politiques allant au-delà du cadre du système de santé, telles que les mesures de taxation, d'étiquetage et de commercialisation, sont également fondamentales pour parvenir à la CSU.
Les chefs d’État et de gouvernement ont la possibilité, en 2023 et après, d’alléger la charge des coûts des soins de santé pour les personnes vivant avec des MNT en augmentant les investissements nationaux et en allouant des fonds publics à la santé, en particulier au niveau des soins de santé primaires.
Priorités de plaidoyer de l’Alliance sur les MNT pour la Réunion de haut niveau de 2023 sur la CSU
L’Alliance sur les MNT défend l’inclusion de la prévention et de la prise en charge des MNT dans la CSU en accordant la priorité aux domaines suivants :
Investir dans la prévention et la maîtrise des MNT grâce à des ressources durables pour la CSU
Les pays doivent financer correctement et gérer efficacement leurs systèmes de santé afin de garantir la CSU et d’améliorer la santé générale et le bien-être économique de leurs populations.
Malgré la hausse des dépenses de santé au plan mondial, la répartition est inégale et les habitants des pays à faible revenu doivent souvent payer de leur poche les services de santé.
Pour parvenir à la CSU, il est important d’augmenter les dépenses consacrées aux soins de santé primaires, d’allouer une part des dépenses des régimes de CSU aux services de prévention et de prise en charge des MNT, de mettre en œuvre des politiques fiscales progressives et des taxes favorables à la santé, tout en éliminant progressivement les subventions aux produits mauvais pour la santé.
Accélérer la mise en œuvre de la CSU en incluant des services de qualité liés aux MNT dans les régimes nationaux d’assurance maladie.
La CSU devrait garantir à l’ensemble de la population un large éventail de services de santé de qualité. Si certains pays ont progressé sur la voie de la CSU, beaucoup restent confrontés à des difficultés telles que les pratiques discriminatoires, la mauvaise qualité des services de santé et l’inégalité d’accès aux médicaments et aux diagnostics.
Pour parvenir à la CSU, les gouvernements doivent développer les soins de santé primaires, inclure les médicaments et les diagnostics des MNT sur les listes essentielles, mettre en œuvre des politiques de santé publique et s’attaquer aux déterminants commerciaux, environnementaux et sociaux de la santé grâce à des efforts intégrés de promotion de la santé et de prévention.
Aligner les priorités de développement et de santé mondiale afin de réaliser la CSU
La CSU et la sécurité sanitaire sont des objectifs étroitement liés, ce qui a été mis en évidence pendant la pandémie de COVID-19 au cours de laquelle les dérèglements des services de santé ont mis en lumière les inégalités sanitaires et l’importance de l’accès universel aux services essentiels.
Il est important d’adopter une approche de la CSU centrée sur l’humain pour répondre aux besoins des personnes vivant avec plusieurs maladies chroniques, ainsi que pour des maladies transmissibles telles que le VIH. Une approche pangouvernementale et pansociétale, qui tienne compte du rôle des autres secteurs et de l’environnement dans l’exposition aux facteurs de risque de MNT, est nécessaire.
Par ailleurs, les décideurs politiques doivent agir pour relier les politiques et la planification de la sécurité sanitaire aux efforts plus larges de renforcement des systèmes de santé, que ce soit pendant les conflits, les urgences humanitaires, les pandémies ou les catastrophes naturelles, afin d'atteindre les objectifs de CSU et de sécurité sanitaire.
Mobiliser et faire participer les personnes vivant avec des MNT afin que la CSU reste centrée sur l’humain
Il est crucial que les personnes vivant avec des problèmes de santé, en tant que copropriétaires du système de santé, participent à la conception, la planification, la mise en œuvre et l’évaluation des programmes et services de CSU. Cela favorisera la mise en place d’un système de santé plus transparent et centré sur l’humain.
Toutefois, les acteurs non étatiques ne disposent actuellement que d'un espace limité pour participer à la conception de la CSU, et très peu de pays ont mis en place des mécanismes de responsabilisation. Il faut faire plus pour formaliser les possibilités offertes à la société civile et accroître sa capacité à participer à ces processus.