4 points à retenir de l’AMS75 : Les MNT plus fortes que jamais
13 juin 2022
13 juin 2022
Pour la troisième semaine que j’ai passée à mon nouveau poste de directrice des politiques et du plaidoyer de l’Alliance sur les MNT à Genève, j'ai participé à la 75ème session de l'Assemblée mondiale de la Santé (AMS75). De retour à l’Alliance sur les MNT, après avoir travaillé pendant dix ans pour d'autres organisations, je me réjouis de voir les progrès accomplis pour inscrire les maladies non transmissibles à l'ordre du jour de la santé mondiale et du développement durable. Grâce à une mobilisation de tous les instants dans un large éventail d'événements parallèles et de réunions, ainsi qu'à des présentations et des déclarations rédigées de manière experte et qui donnent à réfléchir, la communauté des MNT a une fois de plus présenté un front uni, ce que vient souligner la place occupée par les MNT à l’AMS75.
Lorsque je suis montée dans le train pour quitter Genève à la fin de la semaine, j'étais heureuse de savoir que la « décision omnibus » sur les points relatifs aux MNT avait été approuvée par le comité, et que son adoption lors de la dernière séance plénière était assurée. Ces nouveaux engagements fournissent à l'OMS, aux gouvernements et aux autres parties prenantes des indicateurs permettant de suivre les progrès de la lutte contre les MNT. Cependant, pour faire une différence dans la santé des personnes et des communautés du monde entier, tous ces objectifs, la feuille de route et les plans d'action doivent être mis en œuvre dans tous les pays.
Lors des discussions sur le suivi de la déclaration politique de la troisième Réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles (point 14.1), plus de 70 États membres ont pris la parole. Ils ont commenté quatre rapports d'avancement et offert des orientations sur les neuf propositions relatives aux MNT et les objectifs associés, tout en soulignant les questions transversales et spécifiques à chaque pays.
La prévention et le traitement des MNT pendant les épidémies de maladies infectieuses et dans les contextes humanitaires ont été un thème majeur des débats entre États membres. Cela montre le besoin pressant d'intégrer les services essentiels pour les MNT et la santé mentale dans les plans de préparation et de réponse aux urgences, ce qui a été souligné par la France et l'Égypte dans leurs déclarations.
Le Belize a également rappelé à l'Assemblée l'impact de la pandémie sur les services essentiels pour les MNT, tandis que le Mozambique a exhorté les gouvernements à adopter une approche intégrée et holistique de la gestion des maladies transmissibles et non transmissibles. Cela permettra de préserver les progrès réalisés dans la lutte contre les maladies infectieuses et d'améliorer la prestation des services essentiels liés aux MNT, tandis que le monde s'efforce de garantir une couverture sanitaire universelle (CSU).
La complexité de la lutte contre les MNT dans les pays les plus touchés par le changement climatique, comme les petits États insulaires en développement, a également été soulignée pour pointer l'importance de la proposition d’une première conférence ministérielle de l'OMS pour les petits États insulaires en développement sur la prévention et la maîtrise des MNT (2023).
La nécessité urgente de protéger les politiques de santé, en particulier celles relatives aux MNT, contre l'influence des industries des produits mauvais pour la santé a été un thème récurrent dans les déclarations des États membres lorsqu'ils ont évoqué le nouveau plan d'action de l'OMS sur l'alcool. Plusieurs États membres ont utilisé ces déclarations pour souligner qu'il n'existe pas de niveau sûr de consommation d'alcool, malgré les efforts de l'industrie pour continuer à utiliser le terme erroné « usage nocif de l'alcool ».
La faible réglementation des activités des industries nocives pour la santé continue de favoriser la prévalence des principaux facteurs de risque des MNT : consommation de tabac et d'alcool, mauvaise alimentation, sédentarité et pollution de l’air. Les États membres doivent reconnaître que le renforcement du leadership politique en matière de MNT, notamment par l'intermédiaire du groupe des chefs d'État et de gouvernement récemment créé, est une occasion de s'attaquer de manière globale aux facteurs de risque des MNT.
Les États membres ont fortement soutenu la feuille de route 2023-2030 pour la mise en œuvre du plan d'action mondial pour la prévention et la maîtrise des MNT, qui met l'accent sur la participation significative des personnes vivant avec des MNT à tous les niveaux et sur la nécessité pour les États membres d'adopter des approches adaptées. La Norvège et l'Autriche ont réitéré leur demande que la feuille de route soit mise en œuvre en pleine conformité avec les engagements relatifs aux MNT au-delà de l'approche « 4x4 » - y compris ceux liés à la pollution de l’air et la santé mentale.
Les États membres ont adopté des propositions relatives à l'intégration de la santé bucco-dentaire, de l'épilepsie et des troubles neurologiques dans les régimes de prestations de CSU, ainsi que de nouveaux objectifs en matière de diagnostic et de traitement du diabète, de l'épilepsie, des troubles neurologiques et de l'obésité. S'ils ont salué toutes les actions visant à la prévention et au dépistage précoce des MNT, ils ont également attiré l'attention sur la nécessité d'investir de toute urgence dans des soins équitables pour les MNT, en mettant l'accent sur les soins primaires en tant que « premiers intervenants et gardiens des MNT ».
Le manque de financement de l'action contre les MNT est le même problème que celui auquel nous avons été confrontés il y a plus de dix ans, la première fois que j'ai travaillé avec la NCDA, et c'est ma plus grande déception aujourd’hui, de retour dans le monde des politiques relatives aux MNT. Bien trop peu de progrès ont été réalisés dans la mobilisation des ressources nécessaires à la réalisation des engagements mondiaux en matière de MNT. Plus de 7 décès sur 10 dans le monde sont dus aux MNT, mais la prévention et la maîtrise des MNT restent le maillon le plus faible des soins de santé primaires et de la couverture sanitaire universelle.
Cependant, un document de politique sanitaire publié dans le Lancet en 2022 plaide en faveur d'un changement de cap. Il montre que tous les pays - y compris les pays à revenu faible et intermédiaire (PRFI) - peuvent atteindre ou presque la cible 3.4 des ODD, qui consiste à réduire d'un tiers la mortalité prématurée due aux MNT d'ici 2030, s’ils mettent en œuvre un ensemble d'interventions alignées sur les « meilleurs choix » de l'OMS en matière de prévention et de maîtrise des MNT.
J'ai hâte de participer à la Semaine d'action mondiale contre les MNT (du 5 au 11 septembre), au cours de laquelle nous mobiliserons la société civile pour demander aux gouvernements, aux agences de développement, aux organisations caritatives et au secteur privé « d’investir pour protéger » notre santé et de concrétiser les engagements pris en matière de MNT. À l'approche des réunions de haut niveau des Nations unies sur la couverture sanitaire universelle (2023) et les MNT (2025), le thème rappelle aux décideurs politiques qu'investir dans la prévention et la maîtrise des MNT permettra d'économiser de l'argent et de sauver des vies, et que c’est essentiel si nous voulons créer le monde plus juste, plus équitable et durable auquel nous aspirons tous.
Comme je l'ai répété tout au long de la semaine, j'étais ici lorsque les objectifs ont été fixés. Je veux être ici lorsque les objectifs seront atteints.
Alison Cox (@AlisonDDCox) est la directrice des politiques et du plaidoyer de la NCDA. Elle a près de 30 ans d'expérience dans les domaines de l'environnement et de la santé mondiale, et a à son actif des résultats significatifs au sein d’organisations de la société civile tant nationales qu’internationales.