Respirer est une chose que nous considérons généralement comme allant de soi, mais pour des centaines de millions de personnes dans le monde qui vivent avec des maladies respiratoires chroniques, ce n'est pas le cas. Malgré leur forte prévalence et leurs effets catastrophiques sur notre santé et nos économies, les maladies respiratoires chroniques reçoivent bien moins d'attention que d'autres MNT courantes.
À savoir
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Les maladies respiratoires chroniques touchent au moins 550 millions d'adultes dans le monde, et constituent l’une des principales causes de décès et d'incapacité dans le monde.
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Les enfants sont également touchés, l'asthme étant la maladie chronique la plus courante dans cette tranche de population. Elle touche environ 14% des enfants, et ce chiffre est en augmentation.
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On estime que la prévalence des maladies respiratoires chroniques a augmenté de 40% au cours des trente dernières années.
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La charge des maladies respiratoires chroniques est en grande partie évitable et traitable.
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La bronchopneumopathie chronique obstructive est la maladie respiratoire chronique la plus courante, et la troisième cause de décès dans le monde.
Que sont les maladies respiratoires chroniques ?
Les maladies respiratoires chroniques (MRC) sont des maladies des voies respiratoires et d'autres éléments du poumon, et font partie des principales causes de morbidité et de mortalité dans le monde. Parmi les maladies respiratoires chroniques les plus courantes figurent la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), l'asthme, le cancer du poumon et les maladies pulmonaires professionnelles.
À l’échelle planétaire, elles touchent au moins 550 millions d'adultes, bien que certaines estimations aillent jusqu'à 1 milliard, et représentent au moins 7% de l’ensemble des décès dans le monde (4,2 millions). Le cancer du poumon ajoute à ce chiffre 1,4 million de décès supplémentaires par an (2,4% de l’ensemble des décès). Les maladies pulmonaires chez les enfants de moins de cinq ans, qui comprennent à la fois des maladies infectieuses aiguës comme la pneumonie et des affections chroniques comme l'asthme, figurent parmi les causes de décès les plus fréquentes. L'asthme est l'affection chronique la plus courante. Elle touche environ 14% des enfants dans le monde et sa prévalence est en augmentation.
On estime que la prévalence des maladies respiratoires chroniques a augmenté de 40% entre 1990 et 2017. Bien que la majeure partie de cette charge soit évitable ou traitable grâce à des interventions abordables, ces maladies ont reçu moins d'attention que d'autres MNT.
Maladies respiratoires chroniques courantes
Les maladies respiratoires chroniques les plus courantes sont la bronchopneumopathie chronique obstructive et l'asthme, mais il en existe beaucoup d'autres, notamment la mucoviscidose, l'apnée du sommeil et les maladies pulmonaires professionnelles.
Bronchopneumopathie obstructive chronique
La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie respiratoire chronique courante, qu’il est possible d’éviter et de traiter, et dans laquelle les bronchioles se rétrécissent, ce qui provoque une limitation du flux d'air entrant et sortant des poumons. Elle touche environ 300 millions de personnes, soit 4% de la population mondiale. C’est la troisième cause de décès la plus fréquente à l’échelle planétaire. En 2017, 3,2 millions de personnes sont mortes de BPCO, soit 81,7% de l’ensemble des décès dus à des maladies respiratoires chroniques.
Toutefois, il est possible que ces chiffres soient bien plus élevés, car tant le sous-diagnostic que les mauvais diagnostics sont fréquents, en particulier dans les milieux à faibles ressources où l'accès à des soins de base efficaces pour la BPCO est limité. Près de 90% des décès dus à la BPCO chez les personnes âgées de moins de 70 ans surviennent dans les pays à revenu faible et intermédiaire (PRFI).
Les symptômes courants de la BPCO apparaissent à partir du milieu de la vie, notamment l'essoufflement ou les difficultés respiratoires, la toux chronique et la fatigue. À mesure que la BPCO évolue, les personnes ont plus de mal à mener leurs activités habituelles, souvent en raison de l'essoufflement et de la fatigue. Dans certains cas, cela peut conduire à une incapacité, et les traitements médicaux peuvent être coûteux, voire catastrophiques, pour les ménages touchés.
Les personnes vivant avec une BPCO ont tendance à subir des crises aigues, au cours desquelles leurs symptômes s'aggravent considérablement et peuvent nécessiter un traitement supplémentaire à domicile ou à l'hôpital pour des soins d'urgence. Les crises graves peuvent mettre la vie en danger. Les personnes vivant avec une BPCO sont souvent atteintes d'autres maladies chroniques telles que maladies cardiovasculaires, ostéoporose, troubles musculo-squelettiques, cancer du poumon, dépression ou anxiété.
Outre le bilan humain, la BPCO représente une lourde charge économique, en raison de sa prévalence élevée et de sa gravité. Ainsi, on estime que dans l'Union européenne la BPCO coûte environ 48,4 milliards d'euros par an.
Asthme
L'asthme est une maladie respiratoire chronique majeure, dans laquelle les voies aériennes dans les poumons se rétrécissent à cause de l’inflammation et du resserrement des muscles qui entourent les voies respiratoires fines, provoquant toux, sifflement, essoufflement et gêne respiratoire. Les causes de l'asthme sont variées et encore mal connues, mais les facteurs déclenchants peuvent être la fumée, la pollution de l'air, les rhumes, la poussière, les produits chimiques, les changements météorologiques, le pollen de graminées et celui des arbres, ainsi que les poils et les plumes d'animaux.
L'asthme touche aussi bien les enfants que les adultes. C'est la maladie chronique la plus courante chez les enfants, et elle est plus grave chez les enfants vivant dans les PRFI car le sous-diagnostic et le sous-traitement y sont courants et les médicaments efficaces n’y sont pas toujours disponibles ou abordables. Elle touchait environ 262 millions de personnes en 2019, mais certaines estimations évoquent le chiffre de 350 millions. L'asthme provoque près de 500 000 décès par an, soit plus de 1 300 décès par jour, dont un grand nombre d’enfants.
Hypertension pulmonaire
L'hypertension pulmonaire est une maladie chronique caractérisée par une pression sanguine élevée dans les artères pulmonaires. Le début de la maladie n'est pas toujours clair, mais les artères se rétrécissent et le sang a moins de place pour circuler. Avec le temps, certaines artères peuvent se raidir et se boucher complétement.
Le rétrécissement des artères pulmonaires oblige le côté droit du cœur à travailler davantage pour pomper le sang dans les poumons. Le muscle cardiaque finit par se fatiguer et devient incapable de pomper suffisamment de sang pour répondre aux besoins de l'organisme. Le stress supplémentaire fait également grossir le cœur et le rend moins souple. Cela peut entraîner une insuffisance cardiaque, qui est l'une des causes les plus fréquentes de décès chez les personnes atteintes d'hypertension pulmonaire.
L'hypertension pulmonaire touche environ 1% de la population mondiale totale (50 à 70 millions d'adultes) et jusqu'à 10% des personnes âgées de plus de 65 ans. Elle est souvent associée à des maladies pulmonaires chroniques existantes, mais d’autres causes importantes sont la schistosomiase, l'infection par le VIH, le rhumatisme articulaire aigu et la drépanocytose.
Cancer du poumon
Le cancer du poumon est la principale cause de mortalité par cancer dans le monde, avec une charge mondiale de 2,2 millions de nouveaux cas et 1,8 million de décès en 2020. Bien que de nombreux progrès aient été accomplis en matière de diagnostic et de traitement, le cancer du poumon reste une maladie très meurtrière. Elle est en grande partie provoquée par des facteurs de risque modifiables, principalement le tabagisme.
Historiquement, la charge du cancer du poumon était plus élevée dans les pays à revenu élevé, en raison de la tolérance culturelle du tabagisme qui a considérablement diminué ces dernières années. Cette situation est en train de changer avec l’implantation de l'industrie du tabac sur de nouveaux marchés dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Aujourd'hui, plus de 80% des personnes qui fument dans le monde vivent dans des pays à revenu faible et intermédiaire. La prévalence du cancer du poumon devrait leur emboîter le pas.
Bien que le tabac soit impliqué dans la plupart des cas de cancer du poumon, d'autres agents cancérigènes contribuent à accroître le risque chez les non-fumeurs. On estime que 5 à 10% des décès liés au cancer du poumon dans le monde sont imputables à des agents cancérigènes professionnels, tels que l'amiante, et à la pollution de l’air intérieur due à l’utilisation de combustibles issus de la biomasse. La pollution de l'air extérieur augmente également l'exposition aux agents cancérigènes.
Outre son coût humain, le coût économique mondial du cancer du poumon est immense. Selon des études économiques menées aux États-Unis et dans l'Union européenne, le cancer du poumon a le coût le plus élevé de tous les cancers : 21,3 milliards de dollars aux États-Unis en 2015 et 18,8 milliards d'euros dans l'Union européenne en 2009. Bien que les données mondiales en la matière soient limitées, le coût économique annuel mondial lié au cancer du poumon a été estimé à 180 milliards de dollars.
Facteurs de risque et prévention
L'exposition constante aux particules, aux produits chimiques et aux polluants présents dans l'air autour de nous rend nos poumons très vulnérables aux maladies chroniques. Il est toutefois largement admis que le facteur de risque le plus important pour le développement de la plupart des maladies respiratoires chroniques est le tabagisme. Plus de 1,3 milliard de personnes dans le monde consomment du tabac, exposant de nombreuses autres personnes aux méfaits du tabagisme passif. Le tabagisme est à l'origine de 8 millions de décès évitables par an, principalement dus à des maladies cardiovasculaires ou respiratoires chroniques.
La pollution de l’air est un autre facteur de risque important pour les maladies chroniques des poumons et du cœur. À l’échelle planétaire, au moins 2,4 milliards de personnes sont exposées à la pollution de l’air intérieur, généralement due à l’utilisation de combustibles issus de la biomasse dans des poêles ou des cheminées mal ventilés. Les niveaux de pollution de l'air extérieur demeurent dangereusement élevés dans de nombreuses régions du monde. Selon l'OMS, neuf personnes sur dix respirent un air contenant des niveaux élevés de polluants et sept millions de personnes succombent chaque année à une exposition à l'air pollué, bien que d'autres estimations fassent état de plus de 10 millions de décès. La pollution de l’air est donc presque aussi mortelle que le tabac, si ce n'est plus.
L'exposition à des produits chimiques nocifs tels que l'amiante sur le lieu de travail est un autre facteur de risque de maladies respiratoires chroniques. Des liens ont également été établis entre les maladies respiratoires chroniques et l’alimentation, ainsi que le tabagisme maternel pendant la grossesse, qui a un effet négatif sur la fonction pulmonaire de l'enfant à la naissance.
Bien que les déficiences respiratoires soient à l'origine d'incapacités et de décès dans toutes les régions du monde et dans toutes les classes sociales, la pauvreté, le surpeuplement, l'exposition à la pollution de l’air et au tabac, et les mauvaises conditions de vie en général augmentent la vulnérabilité face à ce vaste groupe de troubles.
La plupart des maladies respiratoires chroniques, en particulier la bronchopneumopathie chronique obstructive et le cancer du poumon, devraient être rares car elles sont largement évitables. Toutefois, la lutte contre le tabagisme et la pollution de l’air étant insuffisante, ces maladies demeurent une charge sanitaire mondiale conséquente. Le renforcement des politiques de protection de la santé dans ces domaines est un impératif mondial tant pour la santé de la population que pour celle de la planète.