Décès maternels aux États-Unis: bien trop nombreux
1 février 2022
1 février 2022
Les taux de mortalité maternelle sont en baisse dans les pays développés mais étonnamment, ils sont en hausse aux États-Unis. On recense actuellement environ 700 décès maternels par an dans ce pays, ce qui signifie qu’en moyenne 2 femmes meurent chaque jour et c’est tout simplement inacceptable ! L’ironie tragique est que les mères sont généralement responsables de la santé de tous les membres de leurs familles, et pourtant, elles meurent faute de soins appropriés au moment où elles en ont le plus besoin.
Environ 2 décès de femmes enceintes sur 3 aux États-Unis pourraient être évités, mais cela nécessitera une véritable transformation de la prestation des soins de santé, ainsi que la prise en compte des déterminants sociaux de la santé et du racisme structurel. Si nous voulons réellement avoir un impact positif sur la vie des mères, des nourrissons et des familles, nous devons nous pencher sur la question et plaider pour un changement organisationnel et sociétal.
Les facteurs de risque cardiovasculaire et les taux de mortalité sont plus élevés chez les femmes noires, mais les disparités et les inégalités restent importantes pour les femmes de toutes les minorités ethniques. Faute d’aborder les opportunités de santé pour toutes les mères, nous ne parviendrons pas à modifier de façon substantielle la mortalité maternelle. L’Association américaine du cœur a récemment publié une déclaration de principe visant à améliorer la santé maternelle et les résultats cliniques pendant la grossesse aux États-Unis, indépendamment de l’origine raciale ou ethnique. Une approche en trois volets, axée sur les patients, les prestataires et les systèmes de soins porte sur (1) les disparités et les inégalités (formation des prestataires, amélioration des rapports, financement des soins et de la recherche), (2) la modernisation de la prestation des soins de santé maternelle (conseils avant la conception, élargissement de la couverture postnatale, innovation en matière de modèles de paiement), (3) la mise à jour des technologies et des systèmes (investissement dans les communautés sous-équipées, réduction des écarts de santé dans les zones rurales).
Ainsi, l’investissement récent dans la santé maternelle au titre de la loi Build Back Better (reconstruire en mieux) constitue potentiellement une politique et un investissement complets pour faire progresser la santé maternelle et aborder l’équité en matière de santé parmi les populations américaines vulnérables. Cette loi constituerait le plus gros investissement de l’histoire des États-Unis pour financer la santé maternelle, notamment en s’attaquant aux déterminants sociaux de la santé et à l’équité en matière de santé mentale des mères, en diversifiant les professionnels de la santé périnatale, en élargissant l’accès aux outils numériques porteurs d’équité en matière de santé maternelle, en offrant aux professionnels de santé une formation sur les préjugés et en améliorant les programmes fédéraux de santé maternelle. La législation prévoit par ailleurs l’extension permanente de la couverture des soins de santé pendant les 12 premiers mois suivant l’accouchement. Sans accès aux soins, nous ne pouvons pas faire progresser la santé maternelle. Au plan mondial, l’OMS plaide pour une couverture sanitaire universelle afin d’alléger la charge financière et d’accroître l’accès aux soins pour permettre la lutte contre les maladies, la promotion de la santé et la prévention.
Les chiffres montrent que les femmes qui souffrent de complications maternelles, dont notamment les problèmes de grossesse (dont la pré-éclampsie, l’hypertension maternelle ou le diabète) courent un risque plus élevé de subir dans leur vie une crise cardiaque, un AVC, une insuffisance cardiaque ou une hypertension. Par conséquent, l’accent mis sur la santé maternelle ne doit pas cesser à l’accouchement, ni même au bout de l’année suivante, et la prévention cardiovasculaire est nécessaire tout au long de la vie d’une femme. Il est nécessaire d’approfondir les recherches sur le traitement des maladies cardiovasculaires en fonction du genre, ainsi que sur l’impact des thérapies préventives chez les femmes présentant des problèmes de grossesse, afin de réduire la morbidité et la mortalité maternelles.
Le programme Life’s Simple 7® de l’Association américaine du cœur peut aider tous les habitants de la planète à améliorer la santé cardiovasculaire globale et à réduire la mortalité cardiovasculaire mondiale. Cela vaut pour les mères juste après l’accouchement et se constate même des années plus tard. Les sept facteurs sont la gestion de la tension artérielle, le contrôle du cholestérol, la réduction de la glycémie, la prévention du tabagisme, la perte de poids, l’activité physique et une alimentation saine.
Il est essentiel de répondre aux besoins nutritionnels des mères. L’adage « manger pour deux » pendant la grossesse est révolu. La déclaration scientifique actuelle de l’AHA sur les conseils diététiques préconise un modèle alimentaire sain pour le cœur, quels que soient l’âge et le stade de la vie. En outre, la durabilité et l’impact environnemental sont des concepts majeurs dans ce document. Toutefois, des changements sociétaux sont nécessaires pour améliorer l’éducation nutritionnelle des professionnels de la santé, réduire l’insécurité alimentaire et combattre le racisme structurel et la ségrégation des quartiers. Ces changements sociétaux sont particulièrement importants pour améliorer la nutrition et la santé des mères et de leurs nourrissons, étant donné les taux plus élevés de mortalité maternelle dans les communautés minoritaires et au statut socio-économique inférieur.
La santé maternelle est un objectif crucial qui doit être reconnu au niveau mondial. Sauver les mères n’est pas une option, c’est une obligation et c’est maintenant qu’il faut faire la différence.
Garima Sharma, M.D., directrice du programme de cardio-obstétrique de l’École de médecine John Hopkins, Baltimore, Maryland.
La Dre Laxmi Mehta est cardiologue au Centre médical Wexner de l’université d’État de l’Ohio et professeure à la division de médecine cardiovasculaire de la faculté de médecine. Elle est active en tant que bénévole auprès de l’Association américaine du cœur et membre du comité international de son conseil d’administration national.