Woman cycling in Brazil. Photo by World Obesity Federation

Intégrer l’obésité dans les ripostes à la COVID-19 : un élément capital pour «mieux reconstruire»

10 juillet 2020

Since the beginning of the COVID-19 pandemic, there has been increasing evidence of the link between obesity and COVID-19 complications. The World Obesity Federation recently published a policy dossier on this topic (1). Here we discuss some of the considerations for obesity in COVID-19 responses and how steps to address obesity now can help to ‘build back better’ in the short and long term. Depuis le début de la pandémie de COVID-19, de nombreux éléments indiquent l’existence d’un lien entre obésité et complications de la COVID-19. La Fédération mondiale de l’obésité a récemment publié un dossier à ce sujet (1). Nous partageons ici certaines réflexions sur la façon d’intégrer l’obésité dans les ripostes à la COVID-19, en examinant de quelle manière prendre aujourd’hui des mesures pour s’attaquer à l’obésité peut contribuer à « mieux reconstruire », à court terme et dans la durée. 

Obésité et risques de complications de la COVID-19 

Un âge avancé, le diabète et les maladies cardio-vasculaires ont été identifiés très tôt dans la pandémie de COVID-19 comme étant des facteurs de risque majeurs. Mais à mesure que nous en apprenons davantage, nous nous apercevons que l’obésité constitue également l’un des principaux risques individuels de complications de la COVID-19. Des études menées dans de nombreux pays ont démontré que les personnes atteintes d’obésité ont plus de probabilités d’être hospitalisées (2, 3), d’être admises en soins intensifs (2) et d’avoir besoin de ventilation mécanique invasive (4). Le risque est particulièrement élevé chez les populations asiatiques. Si ce sont les groupes les plus âgés qui risquent le plus de succomber à la COVID-19, un IMC >40 semble également contribuer à une mortalité accrue chez les patients de moins de 50 ans (5). 

Ces corrélations sont particulièrement préoccupantes si l’on pense que près d’un milliard de personnes dans le monde sont atteintes d’obésité et que tous les pays accusent un retard pour atteindre les cibles de l’OMS (6). Les chiffres les plus élevés et l’augmentation la plus rapide ont lieu dans les pays à revenu faible et intermédiaire, qui sont également particulièrement vulnérables aux impacts de la COVID-19. 

Construire la résilience à court terme et dans la durée

Cette pandémie a mis en évidence certains risques et difficultés qui découlent de l’inaction en matière d’obésité et auxquels sont confrontées les personnes vivant avec l’obésité.

À l’instar des autres MNT, nous avons été les témoins de l’impact direct de la COVID-19 sur les personnes atteintes d’obésité, en raison de l’accès restreint aux services. La pandémie a également amplifié les difficultés existantes liées au traitement de l’obésité, telles que les parcours de soins incohérents, la stigmatisation et le manque de couverture sanitaire, ainsi que des problèmes plus généraux d’infrastructure et d’équipement, à l’intérieur et à l’extérieur du système de santé (7).

Certes, l’impact direct de la pandémie affecte principalement les systèmes de santé, mais ses répercussions sont beaucoup plus vastes. Systèmes alimentaires perturbés (8), effets du confinement sur les comportements et les choix alimentaires, pauvreté, inégalités, chômage et marketing « opportuniste » des industries des produits nocifs pour la santé (9) ne sont que quelques exemples des tendances qui se dessinent et qui risquent d’aggraver le double fardeau de la malnutrition. Ceci est particulièrement préoccupant dans les pays qui présentent également des niveaux de pauvreté élevés et des systèmes de santé fragiles. Ainsi, au Mexique, on estime que la réduction du PIB attendue (6%) suite à la COVID-19 pourrait faire bondir de 10 millions le nombre de personnes vivant dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire (10).

Une approche à long terme est nécessaire pour aborder ces questions, et elle doit inclure une priorisation de l’obésité dans la politique sanitaire mondiale ; la réorientation des systèmes pour avoir une meilleure santé (privilégier le transport actif par rapport à la voiture et garantir un accès équitable aux aliments nutritifs et aux services de santé, par exemple) ; et la mise en œuvre de politiques globales solides qui permettent la prévention de l’obésité ainsi que d’autres MNT. 

Faute de commencer à prendre l’obésité au sérieux, les populations resteront vulnérables aux pandémies et autres crises, et les progrès vers la réalisation des cibles sanitaires mondiales et des ODD seront entravés. 

Que fait-on ?

Certains gouvernements ont réagi face aux liens mis en évidence entre COVID-19 et obésité ; des pays comme le Royaume Uni, la France et le Mexique ont ainsi inclus les personnes présentant un IMC élevé dans leur liste des populations vulnérables (1). En France, ceci implique également des mesures de protection de l’emploi et des salaires.

Nous attendons encore une réponse mondiale ferme à l’obésité qui soit intégrée aux ripostes à la COVID-19 et il est nécessaire de renforcer les ripostes à l’obésité dans le cadre des efforts visant à « mieux reconstruire ». 

Un groupe d’experts sur l’obésité à récemment adressé une lettre ouverte au Directeur général de l’OMS demandant à cette organisation de fournir davantage de lignes directrices sur l’obésité, de souligner la nécessité d’accroître la surveillance du poids, de protéger les personnes atteintes d’obésité et de prendre des mesures pour garantir la sécurité alimentaire et nutritionnelle, tout en offrant des possibilités de faire de l’exercice physique et en apportant un soutien en matière de santé mentale (11). Bien qu’elle ne mentionne pas spécifiquement l’obésité, la résolution de l’OMS sur la COVID-19 (12) offre une occasion d’intégrer l’obésité dans les ripostes nationales à la COVID-19 à travers des engagements sur la nutrition et l’activité physique, et de protéger les personnes vivant avec des MNT.

Agir contre l’obésité dès à présent : mettre en œuvre le cadre « ROOTS »

Si nous voulons « mieux reconstruire », les ripostes à la COVID-19 devront intégrer des politiques globales solides visant à réduire l’obésité. Le cadre ROOTS jette les bases d’une action en matière d’obésité : reconnaître l’obésité en tant que maladie, en renforcer la surveillance et le suivi, la traiter tout au long de la vie, équiper les systèmes sanitaires de façon adéquate et s’attaquer aux déterminants structurels et systémiques de l’obésité (13).

Nous avons à notre portée les moyens d’améliorer significativement les résultats de l’action sanitaire, mais nous manquons de volonté politique.

La corrélation entre obésité et complications de la COVID-19 devrait être considérée comme un avertissement sérieux des risques posés par l’inaction en matière d’obésité et du besoin de mettre en œuvre des politiques solides en vue de « mieux reconstruire » et de contribuer à la création de populations résilientes, aujourd’hui et demain.

À propos des auteurs

Simon Barquera (@sbarquera), diplômé en médecine, titulaire d’un doctorat, Directeur du Centre de recherche sur la nutrition et la santé, Institut national de santé publique, Mexique (@1cinys@INSPmx). 

Hannah Brinsden (@hannahbrins), licenciée en sciences, nutritionniste certifiée, Directrice des politiques, Fédération mondiale de l’obésité. 

John Wilding, diplômé en médecine, membre du Collège royal de médecine, Président élu de la Fédération mondiale de l’obésité, Professeur de médecine et médecin consultant honoraire, Département de médecine cardio-vasculaire et du métabolisme, Université de Liverpool, @worldobesity
 
 

References

(1) World Obesity Federations COVID-19 policy dossier. Available at: https://www.worldobesity.org/resources/policy-dossiers/obesity-covid-19

(2) Petrilli, C.M. et al (2020) Factors associated with hospital admission and critical illness among 5279 people with coronavirus disease 2019 in New York City: prospective cohort study. BMJ 2020;369:m1966

(3) Denova E., Barquera, S. Personal communication. Jun 2020

(4) Simonet et al (2020) High Prevalence of Obesity in Severe Acute Respiratory Syndrome Coronavirus‐2 (SARS‐CoV‐2) Requiring Invasive Mechanical Ventilation, 28(7), 1195-1199

(5) Klang, E. et al (2020) Morbid Obesity as an Independent Risk Factor for COVID‐19 Mortality in Hospitalized Patients Younger than 50. Obesity (early view)

(6) World Obesity Federation (2020) Obesity: Missing the 2025 Targets. Available at: https://www.worldobesity.org/resources/resource-library/world-obesity-day-missing-the-targets-report

(7) Jackson Leach, R. et al (2020). Clinical care for obesity: A preliminary survey of sixty‐eight countries. Clinical obesity10(2), e12357.

(8) UN Standing Committee on Nutrition (2020). The COVID-19 pandemic is disrupting people’s food environments: a resource list on Food Systems and Nutrition responses Available at: https://www.unscn.org/en/news-events/recent-news?idnews=2039

(9) NCDA. Help =map unhealthy commodity industries' responses to COVID-19. https://ncdalliance.org/news-events/news/help-map-unhealthy-commodity-industries-responses-to-covid-19

(10) CONEVAL. [Social policy in the context of the SARS-CoV-2 (COVID-19) pandemic in Mexico]. Consejo Nacional de Evaluación de la Política de Desarrollo Social: Mexico City, 2020

(11) Obesity experts write an open letter to WHO regarding COVID-19 and obesity

(12) COVID-19 response resolution. A73/CONF./1 Rev.1. 18 May 2020 Available at: https://apps.who.int/gb/ebwha/pdf_files/WHA73/A73_CONF1Rev1-en.pdf

(13) ROOTS declaration on obesity. Available at: https://www.worldobesityday.org/get-involved/declaration-for-world-obesity-day