Selon deux rapports récents, la consommation de tabac dans le monde est en baisse constante depuis les vingt dernières années, en dépit des efforts incessants déployés par l'industrie du tabac pour interférer dans la réglementation gouvernementale de ses produits.

Selon le rapport de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur les tendances du tabagisme publié le 16 janvier, environ 1 adulte sur 5 dans le monde consommait du tabac en 2022, contre 1 sur 3 en 2000. Cent cinquante pays ont réussi à réduire la consommation de tabac, mais la plupart d'entre eux n'atteindront pas l'objectif volontaire de réduction relative de 30% de la consommation de tabac d'ici 2025, ne parvenant collectivement qu'à une réduction globale de 25%. Parmi les 56 pays qui devraient atteindre la baisse relative de 30% d'ici 2025, le Brésil a enregistré une diminution relative de 35% depuis 2010 et les Pays-Bas sont sur le point d’atteindre l’objectif de 30%.

« Des progrès notables ont été réalisés dans la lutte antitabac ces dernières années, mais il faut rester vigilant. Je suis stupéfait de voir jusqu’où l’industrie du tabac est prête à aller pour faire des profits au prix d’un nombre considérable de vies », a déclaré le Dr Ruediger Krech, Directeur du Département Promotion de la santé à l’OMS, dans un communiqué de presse.

En effet, selon la dernière publication d’une série de rapports sur l’ingérence de l’industrie du tabac dans le monde, cette industrie a intensifié son ingérence dans les politiques de santé publique. Intitulée Indice mondial d'interférence de l'industrie du tabac, la série répertorie les efforts déployés par les gouvernements pour lutter contre l’ingérence de l’industrie depuis 2019.

L’indice 2023, produit par le Centre mondial pour la bonne gouvernance dans la lutte antitabac avec le soutien de STOP, utilise des données collectées par la société civile pour passer en revue 90 pays dans le monde. Depuis la pandémie de COVID-19, l’industrie « a intensifié son ingérence en signant davantage d’accords volontaires avec les gouvernements, en se livrant à des missions diplomatiques et en menant des programmes environnementaux, qui tendent à détourner l’attention des gouvernements », note l’indice.

Les scores de 43 pays se sont détériorés dans le dernier indice, tandis que 29 ont renforcé la protection de leurs politiques de santé, notamment en « appliquant une plus grande transparence, en s’abstenant de collaborer avec l’industrie et en adoptant des politiques qui prévoient des modalités d’interaction avec l’industrie ». Les scores de huit pays sont restés inchangés.

L’indice révèle des résultats décourageants en ce qui concerne l’ingérence de l’industrie dans l’élaboration des politiques :

• Les ministères des Finances, du Commerce et de l’Investissement ont continué d’être ciblés par l’industrie du tabac.
• De nombreux gouvernements ont encore accepté des cadeaux de l’industrie, sous l’appellation « responsabilité sociale des entreprises » (RSE).
• Des problèmes mondiaux tels que les effets persistants de la pandémie de COVID-19, les catastrophes naturelles et le besoin croissant de protection de l’environnement ont conduit les gouvernements à continuer à accepter la charité de l’industrie et à faire des compromis sur les politiques.
• La transparence et la responsabilisation ont pris du retard : la plupart des pays ne disposent pas de règles concernant la divulgation des réunions avec l'industrie du tabac, ni d'un registre des lobbyistes ou de politiques visant à exiger de l'industrie qu'elle communique des informations sur le marketing et le lobbying.
• Cinq pays ont signalé que l’industrie du tabac avait saboté les efforts visant à adopter des lois globales conformes à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac.

Sur une note plus positive, quatre gouvernements ont progressé dans la protection de leurs politiques contre l’ingérence de l’industrie du tabac : le Botswana, la Bosnie, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire.

Voici certaines des recommandations de l’Indice pour réduire l’ingérence de l’industrie et protéger la santé de la population :

• Impliquer l’ensemble du gouvernement pour restreindre l’ingérence de l’industrie du tabac.
• Exiger une transparence accrue pour plus de responsabilisation.
• Dénormaliser et interdire les activités de « RSE » du secteur du tabac.