Une action immédiate permettrait d’éviter un tsunami de maladies non transmissibles, selon des rapports

10 février 2020

L’Alliance sur les MNT et l’Organisation mondiale de la Santé publient deux rapports au premier jour d’une réunion majeure aux Émirats arabes unis.

Lundi 10 février 2020 (Sharjah, EAU) — Selon deux nouveaux rapports de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et de l’Alliance sur les MNT (NCDA) publiés à l’occasion du Forum mondial de l'Alliance sur les MNT qui s’est tenu cette semaine à Sharjah, aux Émirats arabes unis, les gouvernements du monde entier doivent considérablement accélérer leur riposte face à l’épidémie de maladies non transmissibles (MNT) pour pouvoir sauver des millions de vie d’ici 2025. 

La NCDA, alliance mondiale de la société civile et co-organisateur du Forum aux côtés de l’organisation hôte locale Friends of Cancer Patients (FOCP), a publié un nouveau rapport intitulé Réduisons les écarts, qui propose une analyse et une critique de l’état d’avancement de la lutte contre les MNT, du point de vue de la société civile. 

Le rapport Suivi des progrès dans la lutte contre les MNT 2020 compile les progrès réalisés par 194 pays à l’aune de 10 indicateurs sur les MNT. Parmi ces indicateurs, la fixation de cibles assorties de délais pour réduire les décès provoqués par les MNT ; le développement de politiques intégrées sur les MNT ; la mise en œuvre de mesures cruciales de réduction de la demande de tabac, de mesures de réduction de l’usage nocif de l’alcool, de lutte contre la mauvaise alimentation et de promotion de l’activité physique ; et le renforcement des systèmes de santé à travers les soins de santé primaires et la couverture sanitaire universelle. 

Selon le rapport de la NCDA, les données tirées d’une enquête menée auprès de ses alliances nationales et régionales sur les MNT reflètent cette triste réalité. Seules 20 pour cent des alliances considèrent que les politiques actuelles de lutte contre les MNT permettent à leur pays d’être en bonne voie pour atteindre les cibles 2025 ou 2030 en matière de MNT. En 2015, les dirigeants mondiaux se sont engagés à réduire d’un tiers les décès prématurés provoqués par les MNT à l’horizon 2030. En outre, seules 18% des personnes ayant répondu à l’enquête de la NCDA pensent que leur pays a suffisamment de mécanismes de responsabilisation pour s’assurer que ces objectifs soient réellement atteints. 

« Ce rapport confirme ce que nous soupçonnions depuis longtemps, à savoir que les cibles fixées par les Nations unies pour réduire les MNT ne portent pas leurs fruits sur le terrain », a déclaré Katie Dain, Directrice générale de l’Alliance sur les MNT. « Si nous n’arrivons pas à réduire les écarts constatés dans la riposte aux MNT, nous serons confrontés en 2030 à un tsunami d’impacts humains et économiques liés à ces maladies, un tsunami que nous aurions pu éviter. »

Les maladies non transmissibles sont la première cause de décès prématurés dans le monde. Les MNT sont responsables d’un peu plus de 70 pour cent de l’ensemble des décès à l’échelle planétaire. 41 millions de personnes meurent chaque année de MNT, telles que les maladies cardiovasculaires, le cancer, l’AVC, le diabète et les maladies respiratoires. 15 millions d’entre elles ont moins de 70 ans. Selon la NCDA, ces décès prématurés et leurs effets dévastateurs sur les familles et les communautés dans le monde sont en grande partie évitables. 

Les deux rapports mettent en lumière une tendance inquiétante : des progrès lents et inadéquats en matière de MNT au plan national. 

Bien que nous disposions de données solides sur ce qui fonctionne pour éviter ou retarder la plupart des décès par MNT, la mise en œuvre par les pays d’un ensemble de politiques présentant un bon rapport coût-efficacité est insuffisante au regard des preuves et des données économiques.

Réduisons les écarts souligne cinq grands écarts qui freinent le progrès : leadership politique, investissement, soins, mobilisation communautaire et responsabilisation.

Ainsi, seuls deux pays, le Brésil et la Turquie, ont mis en œuvre les cinq mesures de réduction de la demande de tabac figurant dans la Convention-cadre pour la lutte antitabac. Par ailleurs, seule une faible minorité de systèmes de santé nationaux dans le monde est actuellement en mesure de fournir à toutes les personnes vivant avec des MNT le traitement et la prise en charge nécessaires. Ainsi, seuls un tiers des pays proposent un traitement médicamenteux et des consultations pour prévenir les crises cardiaques et les AVC et seuls 40 pour cent des pays proposent des soins palliatifs en santé primaires ou au niveau communautaire. Dans leur immense majorité, les personnes vivant avec des MNT dans le monde n’ont pas accès aux soins dont elles ont besoin, soit par manque de disponibilité, soit parce que ces soins sont localement inabordables. Écart en matière de leadership

Les engagements mondiaux en matière de MNT ne sont pas suffisants : ils doivent s’accompagner d’un leadership politique au plus haut niveau et d’actions transformatrices à l’échelle nationale. Les déficits de leadership, de bonne gouvernance, de planification et de coordination multisectorielle exacerbent les MNT et les inégalités. Afin d’atteindre les cibles nationales et de sauver des vies, une réponse de l’ensemble du gouvernement et de la société face aux causes, impacts et solutions des MNT est nécessaire.

Écart en matière d’investissement

Améliorer la santé est un investissement stratégique à long terme qui n’est pourtant souvent vu que comme une dépense. Bien que les bénéfices de la lutte contre les MNT soient supérieurs au coût de l’inaction, l’écart en matière d’investissement reste immense. L’investissement dans la réduction de la charge de MNT a été trop longtemps négligé et requiert un financement important, prévisible, soutenu et traçable au niveau du pays, du développement et des bailleurs de fonds.

Écart en matière de soins

Afin de réaliser la santé pour tous, les systèmes de santé doivent être réorientés pour intégrer la prévention et la prise en charge des MNT tout au long de la vie et garantir un accès approprié et équitable, sans engager des dépenses catastrophiques. De nombreux systèmes de santé restent sous-financés, mal préparés et inadaptés pour faire face aux besoins complexes de prise en charge et de traitement des personnes qui vivent avec des maladies non transmissibles et chroniques.

Écart en matière de mobilisation communautaire 

La reconnaissance par les gouvernements de l’importance de la société civile (dont les personnes vivant avec des MNT, les organisations et les communautés) et de sa participation significative à la riposte aux MNT ont été trop lentes et laissent à désirer. En tant qu’acteurs de changement, les membres de la société civile jouent un rôle crucial dans l’accélération des progrès en matière de MNT, ainsi que dans le suivi et la responsabilisation des gouvernements, en tant que créateurs de demandes, militants et agents d’innovation. 

Écart en matière de responsabilisation

Processus cyclique de suivi, de révision et d’action comprenant notamment des systèmes de surveillance et de données, la responsabilisation est indispensable pour combler l’écart entre les promesses politiques, la planification et les droits, d’une part, et la mise en œuvre efficace des politiques, un changement programmatique réel et un impact concret, dans le domaine des MNT. Outre les processus mondiaux et nationaux, des mécanismes indépendants de responsabilisation pilotés par la société civile pourront contribuer à réduire cet écart et à accélérer l’adoption de mesures efficaces.

Des progrès minimes en matière de MNT

Le rapport Suivi des progrès dans la lutte contre les MNT 2020 mesure les progrès réalisés par 194 pays à l’aune de 10 indicateurs clés :

  • Cibles et indicateurs nationaux pour les MNT

  • Données sur la mortalité

  • Enquêtes sur les facteurs de risque

  • Politique/stratégie/plan d’action national(e) intégré(e) sur les MNT

  • Mesures de réduction de la demande de tabac

  • Mesures de réduction de l’usage nocif de l’alcool 

  • Mesures pour combattre les régimes alimentaires nocifs pour la santé 

  • Éducation publique et campagnes de sensibilisation à l’activité physique

  • Directives pour la prise en charge du cancer, des maladies cardiovasculaires (MCV), du diabète et des affections respiratoires chroniques

  • Thérapie médicamenteuse/ conseils afin de prévenir les infarctus du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux 

Les résultats figurant dans le rapport montrent que peu de progrès ont été accomplis depuis 2015 et que ces progrès sont inégaux d’un pays à l’autre. Pas un seul pays ne respecte l’ensemble des indicateurs. La moitié des pays respecte 3 indicateurs et sous-indicateurs sur 19.

 « Les pays ne respectent toujours pas les indicateurs de base. S’ils poursuivent dans cette voie, des millions de personnes mourront inutilement de crise cardiaque, d’AVC, de diabète, de cancer et de maladie respiratoire », a déclaré le Dr Ren Minghui, Sous-directeur général en charge de la CSU/Maladies transmissibles & non transmissibles à l’OMS, Suisse.

Un nombre alarmant de pays ne dispose même pas des éléments fondamentaux d’une riposte nationale. Environ un quart (26%) des pays n’ont pas instauré de plan national multisectoriel de lutte contre les MNT, et un tiers ne disposent pas de cibles nationales assorties de délais permettant de piloter et de suivre les progrès en matière de lutte contre les MNT. En outre, seuls 19% des pays ont pleinement mis en œuvre les taxes sur le tabac ; seuls 20% des pays progressent en matière de réduction de la teneur en sel ; et seuls un tiers des pays proposent au moins des services de base liés aux MNT, tels que la thérapie médicamenteuse et les conseils afin de prévenir les MCV et les AVC.

« Nous savons ce qui marche : les soins de santé primaires, qui mettent l’accent sur la promotion de la santé et la prévention de la maladie, constituent la manière la plus inclusive, efficace et performante de réduire la mortalité prématurée due aux MNT et de promouvoir la santé mentale et le bien-être. Mais les données dont nous disposons indiquent que nous devons agir bien au-delà du secteur de la santé pour juguler l’épidémie. Nous devons traiter les causes profondes des MNT, qui viennent des aliments que nous ingérons, de l’eau que nous buvons, de l’air que nous respirons et des conditions dans lesquelles nous vivons, travaillons et nous divertissons », a déclaré le Dr Minghui.

 

Note aux éditeurs

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