ENTRETIEN : La genèse de la nouvelle stratégie de l’Afrique du Sud en matière de MNT
19 septembre 2022
19 septembre 2022
La Dre Vicki Pinkney-Atkinson est Directrice de l’Alliance sud-africaine sur les MNT, qui a œuvré aux côtés du gouvernement pendant huit ans pour élaborer ce document. Elle évoque ici le processus suivi et les résultats obtenus.
Vicki Pinkney-Atkinson : « Nous sommes ravis d’avoir finalement réussi à publier un plan... avoir un plan est l’étape la plus positive, et aussi le fait qu’il s’agisse d’une politique. C’est une politique nationale, elle est passée par tous les processus, et je pense que c’est un élément considérable. Et c’est une politique dont la société civile (et j’entends par là vraiment des personnes vivant avec des maladies non transmissibles) a participé à l’élaboration. Et donc nos voix ont été reconnues et entendues... et c’est cela qui constitue pour moi la plus grosse réussite de tous les temps. »
Vicki Pinkney-Atkinson : « Oui, cela ne fait aucun doute. Nous avons un système remarquable en Afrique du Sud pour les maladies transmissibles (VIH, tuberculose, etc.). Il y a une participation [de la société civile] à laquelle le militantisme a contribué au fil des ans. Il n’en allait pas de même pour les MNT. Ce que nous avons fait n’était pas différent de ce que les militants du VIH ont fait pour faire reconnaître la maladie et susciter une mobilisation... Nous avons demandé, étape par étape, les mêmes choses et nous avons été catégoriques sur le fait que nous devions obtenir le même genre d’accord que celui qu’avaient obtenu les personnes vivant avec le VIH et le sida... nous sommes même allés jusqu’à reprendre chaque partie du plan et vérifier tous les faits, tout en nous assurant que les individus étaient impliqués et mobilisés. Et bien sûr, tout cela n’a été possible que grâce au financement que nous avons obtenu par l’intermédiaire de l’Alliance mondiale sur les MNT, qui nous a permis d’avoir une petite équipe. C’est comme cela que nous avons procédé. »
Vicki Pinkney-Atkinson : « Oui. Nous avons fait les deux, contenu et processus... La plus grande partie d’un plan stratégique sur les MNT n’a rien de compliqué. Il faut de la prévention, il faut avoir des ressources. Ce sont des éléments de base. Le point de départ numéro un pour nous a consisté à comparer notre plan stratégique et le plan stratégique sur le VIH. Avons-nous obtenu tout ce que nous voulions ? Non, mais nous avons obtenu bien plus que ce avec quoi nous avions commencé... Comme pour les premiers plans de lutte contre le VIH (et j’ai participé à la rédaction de ces plans), nous reprenions à la source un problème négligé au sein de notre société, en l’occurrence les MNT. Finalement, j’ai siégé au comité technique, à la toute fin du processus. »
Vicki Pinkney-Atkinson : « Ce que nous avons avec les Meilleurs choix [de l’OMS], dans l’ensemble (et c’est un excellent conseil du point de vue de la santé publique), c’est que nous traitons les maladies dites de mode de vie (et je déteste l’expression « mode de vie ») avec ces interventions ... et ce à long terme, pas à court terme. En tant que personne vivant avec des MNT, je dis : « Très bien, allez-y, faites-le » (mais)... Je parle de personnes qui doivent recevoir un traitement pour ne pas devenir aveugles ou être amputées d’une jambe. Je parle de gens qui doivent recevoir un traitement maintenant. La prévention primaire est parfaite, elle est parfaite, mais on ne peut pas ne pas traiter les personnes vivant avec des MNT et indiquer ensuite qu’il s’agit d’une intervention rentable. Et cela pour moi, ce ne sera jamais acceptable, et je pense que si vous posez la question à n’importe quelle personne vivant avec une MNT, elle répondra la même chose. »
Vicki Pinkney-Atkinson : « Nous devons nous concentrer sur la mise en œuvre du plan. Nous sommes dans un système fédéral... nous avons neuf provinces et, pour la première fois, nous avons des provinces qui se réunissent la semaine prochaine pour rédiger leurs propres plans régionaux en matière de MNT... Donc, le grand point de départ (et c’est merveilleux), c’est de travailler avec les provinces pour élaborer des plans... de s’assurer de la mobilisation des individus et de veiller à obtenir les services dont nous avons besoin. Comme une personne vivant avec le VIH le ferait pour cette maladie, nous voulons obtenir un traitement pour le diabète, l’hypertension, pour toutes ces maladies. Et cela va bien nous prendre les six prochaines années. Pourtant, la société civile des MNT est insuffisamment financée, contrairement au VIH/SIDA... L’une des choses que nous voulons mettre en place de toute urgence (et cela figure dans le plan), c’est une instance de coordination de toute la société et de l’ensemble du gouvernement, pour s’assurer que les MNT reçoivent l’attention dont elles ont besoin. »
Vicki Pinkney-Atkinson : « Il n’y a pas de financement qui le permette... Nous sommes bloqués à tous les niveaux. Et ce sont vraiment des gens comme moi (et je ne veux pas dire par là que je suis une héroïne) mais beaucoup d’autres aussi, qui donnent de leur temps et de leur énergie pour le faire, parce que cela doit être fait. Mais ce n’est tenable à aucun niveau. »
Vicki Pinkney-Atkinson : « Je pense que nous avons toujours (et cela fait longtemps que je suis active dans ce domaine) travaillé dans la mesure du possible en coopération avec le gouvernement. Ce n’est pas la guerre. Et sur les questions quotidiennes, dans le cadre de consultations et avec de nombreux responsables, les choses se passent bien. Mais il y a un niveau auquel les MNT et les soins de santé ont été politisés. Et c’est vraiment là que se posent des difficultés... Au niveau supérieur, ils ne sont pas prêts à négocier ; aucun politique n’a jamais répondu à aucun de mes courriers sur ces sujets. »